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03/10/2020 | Chroniques

Le Poing: le retour de la lutte au Québec, que les vrais délinquants soient dénoncés

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Pat Laprade

Pat Laprade

Ce n’est pas la controverse qui manque dans la lutte québécoise. Impliqué dans différents rôles depuis 19 ans maintenant, j’en ai vu de toutes les couleurs.

Mais l’année 2020 est spéciale. Très spéciale.

Je croyais que la lutte québécoise allait s’unir en ce temps de pandémie. Et c’est le sentiment que j’avais jusqu’à tout récemment. Je parlais à différents promoteurs qui se parlaient entre eux, partageant certaines de leurs discussions avec les différentes instances gouvernementales. Les lutteurs et lutteuses semblent eux aussi être au même diapason en ce qui a trait aux mesures préventives, personne ne voulant lutter sans que ce soit sécuritaire de le faire.

Mais c’était trop beau pour être vrai.

Tout comme dans la vraie vie, les différents acteurs impliqués dans la lutte au Québec ont des opinions différentes sur le retour de la lutte, tout comme l’opinion publique est différente sur la fermeture des bars ou sur le port du masque.

La semaine dernière, via son compte Facebook, Carl Leduc, co-promoteur de la Fédération de Lutte Québécoise (FLQ) avec sa conjointe Dina Marneris, y est allé de propos, tant publics que privés, qui ont fait jaser.

En effet, l’ancien lutteur, membre de la célèbre famille du même nom, a mentionné que la lutte québécoise n’avait toujours pas reçu l’autorisation de produire des événements de lutte, avec ou sans public, tout en dénonçant, sans les nommer publiquement, les deux promotions qui ont récemment recommencé leurs activités, soient la NSPW et l’IWS, suggérant également, sans s’en enquérir au préalable, que les deux n’avaient pas eu l’autorisation de la santé publique, qu’elles avaient donc produit des shows de façon illégale et qu’elles devraient être dénoncées.

« Tu peux écrire un plan, mais après sa (sic) te prend une réponse écrite de la santé publique confirmant l’autorisation avant de faire des shows », a écrit Leduc dans une publication Facebook qui a été retirée depuis. Il mentionnait également que les lutteurs n’avaient pas été testés au préalable.

Une autorisation et des tests sont-ils obligatoires?
D’ailleurs, c’est ce dernier point qui semble déranger.

« Je comprends qu’aucune promotion de lutte au Québec n’a les reins assez solides pour tester leurs lutteurs, les confiner dans une chambre d’hôtel en attendant les résultats et les tester une autre fois avant leur match, me disait Dina lorsque je lui ai parlé plutôt cette semaine. Mais il faut tout de même faire les choses de la bonne façon. Depuis le début de la pandémie que j’ai des communications avec les instances gouvernementales. J’ai même parlé avec quelqu’un du bureau du Dr. Horacio Arruda », explique celle qui travaille dans la vie de tous les jours en milieu scolaire et qui est donc confrontée de près à cette réalité.

Dans une communication qu’elle a reçue le 17 juin dernier et dont j’ai reçu copie, la direction générale de la santé publique lui répondait que les combats pratiqués dans certains sports, comme la lutte professionnelle, n’étaient pas autorisés. On lui suggérait de consulter la section Reprise des activités sportives, de loisir et de plein air en contexte de COVID-19 sur le site du gouvernement.

Le lendemain, 18 juin, Steve Boutet, promoteur de la NSPW, recevait lui aussi une correspondance de la direction générale de la santé publique. Cette dernière demeurait plus vague sur la question, mais faisait également référence au document sur la reprise des activités sportives, sans toutefois mentionner clairement si elle autorisait ou pas la reprise de ses activités.

Mais ça c’était en juin, au moment où les sports de combats n’étaient pas encore autorisés. La situation a changé au début du mois de septembre.

Si on va sur le site du gouvernement dans la section citée plus haut, on y retrouve le texte suivant :

« À compter du 2 septembre, les affrontements dans les sports de combat des disciplines sportives, tels que le karaté, le taekwondo, la boxe et le judo, pourront reprendre selon les recommandations émises par les autorités de santé publique, mais les compétitions demeurent interdites. Plusieurs adaptations sont nécessaires, notamment la création de petits groupes d’entraînement stables dans le temps d’au maximum quatre personnes, pour limiter les contacts étroits avec les personnes qui n’en font pas partie. Les affrontements doivent être de courte durée et les exercices impliquant des contacts de courte durée doivent être privilégiés. Les mesures de distanciation physique de deux mètres s’appliquent en tout temps, sauf lors des affrontements comme tels. Les compétitions demeurent interdites. Les consignes sanitaires à adopter ainsi que les directives de santé publique lors de la pratique d’activités physiques, sportives, de loisir et de plein air doivent être suivies en tout temps. »

Évidemment, on ne mentionne pas la lutte professionnelle, une goutte d’eau dans l’univers des sports de combats, et on ne définit pas la notion d’affrontements et de compétitions. Selon plusieurs, un affrontement c’est ni plus ni moins un combat. Une compétition, dans ce contexte, c’est un tournoi et dans un tournoi, il devient plus difficile de faire respecter des bulles de quatre personnes, ce qui expliquerait la nuance apportée entre les deux.

À la lutte professionnelle ça se traduit comment? Bien une bulle de quatre personnes est créée dans laquelle les quatre personnes peuvent uniquement lutter les unes contre les autres. De cette façon, si jamais un des quatre contractait la COVID, seules trois autres personnes seraient potentiellement infectées.

En résumé, voici ce que le texte oblige :

• Création de petits groupes d’au maximum quatre personnes
• Affrontements de courte durée
• Distanciation de deux mètres, sauf lors des affrontements
• Et on demande de bien suivre les directives de santé publique

À aucun endroit il est indiqué qu’on doit attendre l’autorisation de la santé publique. À aucun endroit on dit que des tests sont obligatoires.

Puisque la lutte n’est pas soumise aux règles de la Régie des alcools, des courses et des jeux, elle n’aurait donc pas à attendre son autorisation avant de produire un évènement. Et si pour la boxe on demande des tests et un confinement, c’est justement à cause de la Régie. Une promotion de lutte, comme n’importe quelle autre entreprise au Québec, aurait seulement l’obligation de suivre les règles établies pour la sphère de la société qu’elle occupe.

Un promoteur qui a un plan bien défini qu’il fait respecter, plan qu’il pourrait remettre à un inspecteur si une visite était faite, et qui suit les règles mentionnées plus haut, pouvaient donc reprendre ses activités.

« Tout le monde prend les directives et en fait sa propre interprétation selon ses connaissances et sa compréhension, me disait Dina. Personne n’a raison, personne n’a tort. C’est un dossier complexe. Tout peut être contesté dans les directives de santé publique. Ultimement, l’important est d’assurer le plus possible la sécurité de tout le monde, tout en sachant que le risque zéro n’existe pas. »

La NSPW et l’IWS: deux cas différents, même résultat
Dans mon texte du 14 septembre dernier sur le sujet, je mentionnais qu’il était difficile pour les promoteurs d’obtenir une réponse d’un pallier de gouvernement pour la réouverture de la lutte étant donné que la lutte n’est pas gérée par la Régie et par conséquent, n’est pas une priorité.

Et c’est justement sur ce dernier aspect qu’il faut s’attarder.

Le promoteur de l’IWS Manny Eleftheriou a lui aussi parlé avec plusieurs personnes de différentes instances gouvernementales.

« J’ai parlé avec le responsable des sports de combats à la Régie, Michel Hamelin, qui m’a dit que la lutte professionnelle n’était pas régie par ses règles. Il m’a conseillé de communiquer avec la direction régionale de santé publique à Montréal. Ce que j’ai fait au début septembre. »

Et contre toute attente, Eleftheriou a reçu une réponse positive

En effet, preuves à l’appui, Eleftheriou a reçu, le 5 septembre dernier, l’autorisation du chef médical du service environnement urbain et saines habitudes de vie de la direction régionale de santé publique à Montréal de produire un enregistrement télévisuel pour RDS avec des bulles de quatre personnes dans les installations privées de l’IWS tout en suivant les mesures préventives mises en place, ce que ce dernier trouvait conforme avec les directives provinciales en vigueur.

Du côté de Québec, bien que la NSPW n’ait jamais reçu une autorisation similaire, toutes les règles déjà mentionnées ont été respectées. Des bulles de quatre lutteurs avaient aussi été pensées et les enregistrements servaient pour MaTV, avec qui la promotion vient de s’entendre.

Dans les deux cas, les lutteurs présents à qui j’ai parlé se sont sentis en sécurité, aucun spectateur n’était permis, on n’utilisait que du talent local et les mesures préventives étaient suivies. En fait, la seule différence entre la NSPW et l’IWS, c’est que l’IWS a eu une autorisation, autorisation qu’elle n’avait pas besoin légalement d’obtenir, mais qui est quand même toujours un plus à avoir.

Rien d’illégal, ni pour un, ni pour l’autre.

Par contre, avec Montréal et Québec qui sont en zones rouges, le tout devrait changer à compter de lundi. En effet, selon les documents obtenus par Radio-Canada, les sports d’équipe et de combats seraient interdits en zone rouge. Cependant, le premier ministre François Legault, a affirmé hier que les décisions finales à ce sujet n’étaient pas encore prises, mais qu’elles le seront lundi.

Dénoncer les vrais délinquants
Selon moi, les efforts des dénonciateurs devraient être mis sur les vrais délinquants, ceux qui n’ont pas de plans, ceux qui ne prennent pas de mesures préventives, ceux qui ne suivent pas les règles de la santé publique et du décret sur la reprise des activités dans les sports de combats.

Et malheureusement, il y en a eu.

Un amateur de lutte de longue date, Sébastien Gamache, qui contribuait par le passé à des événements bénéfices à Montréal afin, entre autres, d’être un gérant d’un soir, a récemment acheté l’arène qu’utilisait le lutteur et promoteur Jeremy Barnoff, aussi connu sous le nom de Black Dynamite.

Après cet achat, vers la fin du mois de juillet, ce ring s’est retrouvé dans la cour arrière d’un bloc appartement situé au 12 005 rue Lapierre à Montréal-Nord, où demeure un autre fan de lutte, qui est aussi à l’occasion un bénévole dans certaines organisations de lutte, René Gagné. C’est alors qu’un show de lutte a été présenté, devant des fans assis sur des chaises de jardins ou sur leur balcon. Ce n’est pas clair si d’autres événements ont été présentés par la suite, mais minimalement, il y en a eu un autre dimanche le 27 septembre, alors que Montréal était en zone orange.

Évidemment, de la façon qu’on me décrit la scène, aucune sinon très peu de mesures préventives étaient suivies. Par exemple, l’arène n’était pas désinfectée après chaque combat et il n’y avait pas un concept de bulles de quatre lutteurs. Déjà que je ne suis pas un fan de ce qu’on appelle en anglais du backyard wrestling, littéralement de la lutte dans une cour, je le suis encore moins dans les conditions actuelles.

Gamache n’a pas répondu à ma demande d’entrevue, alors que dans un enregistrement audio qu’on m’a fait écouter, Gagné se défendait en disant qu’il s’agissait d’un événement privé dans une cour et que ce n’était pas des affaires de personne.

Justement.

Étant donné que le tout se déroulait dans un lieu privé, ce sont les règles pour les rassemblements extérieurs qui s’appliquent et dans lesquelles, au fil du temps, seulement un maximum de 10 personnes a été permis en même temps, six en zone orange. Quatre policiers se seraient présentés dimanche dernier et auraient dit aux organisateurs de terminer leur événement et de ne plus en faire. L’arène a finalement connu un bris avant la fin de l’événement, ce qui est peut-être pour le mieux.

Jouer à la lutte : d’importantes conséquences
Vous savez, il y a deux types de personnes qui font de la lutte : ceux qui prennent ça au sérieux et ceux qui jouent à la lutte. Les personnes qui y participaient tombent dans la deuxième catégorie et c’est ça qui est fâchant. J’espère que ces vagabonds, comme dirait mon collègue Kevin Raphaël, vont arrêter ou se faire prendre par la police, question de ne pas entacher la réputation de ceux qui travaillent fort et qui mettent du temps et de l’argent dans des mesures et un plan concret comme la NSPW, IWS, NCW et FLQ.

Pour les lutteurs et lutteuses sérieux, qui travaillent pour des organisations sérieuses, qui ont hâte de renouer avec la lutte et qui seraient tentés de lutter dans ce genre d’environnement, prenez votre mal en patience et pensez-y deux fois avant de le faire.

Parce que si la lutte professionnelle devient clandestine au Québec, et de ce que j’entends, d’autres événements auraient eu lieu ailleurs au Québec, qu’une éclosion en ressort et que les médias traditionnels s’emparent de la nouvelle, la manchette ne sera pas « Mr. X cause une éclosion », mais bien « Un gala de lutte cause une éclosion ». Cela pourrait faire très mal aux promotions qui deviendraient des dommages collatéraux de ces personnes, qui se croient plus intelligentes que les autres.

Et si le gouvernement réalise qu’il perd le contrôle, il pourrait ultimement décider que la lutte professionnelle soit de nouveau gérée par la Régie, comme elle l’est dans l’état de New York par exemple. Si tel était le cas, peu de promotions pourraient survivre, alors que les coûts pour un permis, une ambulance et un médecin sur place viendraient à eux seuls miner la totalité des profits.

Je souhaite donc sincèrement que ces « promoteurs » et que ces « lutteurs » se fassent dénoncer et qu’aucun autre type d’événement de ce genre n’ait lieu.

Laissons la lutte aux professionnels. Comme l’adage le dit, « n’essayez pas cela à la maison » ou dans ce cas-ci, dans votre cour.

Resto-Bar
Cette chronique est une presentation du Resto-Bar Coin du Métro. Le Resto-Bar Coin du Métro, 10 719 Lajeunesse, l’endroit par excellence pour tous les événements sportifs tels que le hockey, le soccer, la boxe, la lutte et le football à Montréal! Vous pouvez aussi consulter leur page Facebook.

Bonne lutte à tous et à toutes!

Si vous avez des questions, des suggestions ou des commentaires, n’hésitez pas à communiquer avec moi au patric_laprade@videotron.ca, sur ma page Facebook ou sur mon compte Twitter.

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