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22/03/2015 | Chroniques

Lutter selon sa position sur la carte

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J’ai dit dans une chronique antérieure que la lutte était un amalgame d’agents libres qui travaillent pour eux-même mais en équipe. J’aimerais développer là-dessus, mais pousser ma réflexion plus loin. Le travail d’équipe n’est pas seulement entre les deux individus qui livrent le combat, mais aussi, que chaque combat doit être travaillé dans le but que le gala entier se tienne et ait une progression. Les bons lutteurs savent travailler selon la position qu’ils ont sur le gala, car chaque match a sa responsabilité envers les autres sur la carte. Ce dont je veux parler s’applique aux galas “live” ou les “house shows” de fédérations importantes. Car pour la télévision, c’est vraiment un autre rythme dû aux pauses publicitaires et à l’avantage d’avoir des descripteurs qui vendent la rivalité et explique clairement ce que tu veux présenter aux fans.

Avant de continuer, j’aimerais préciser que mes chroniques n’ont pas comme but premier d’enseigner la lutte à des gens du milieu, tant mieux si ça peut aider, mais je vois plus ça comme l’explication aux amateurs de la démarche artistique derrière tout ça. Je considère la lutte comme un art et pour être conséquent, il m’apparaît juste d’en parler tel un artiste. Il n’est plus question “d’exposer la business” comme on disait dans le temps, mais d’expliquer aux fans tout le travail qu’il y a pour en arriver à ce qu’ils voient et apprécient. Tout comme James Hetfield de Metallica qui expliquerait comment il en est venu à composer et écrire telle chanson et comment ils ont travaillé dur en studio lors de l’enregistrement pour donner le son que nous aimons écouter. En tant que fan de musique, ça me fait aimer ces artistes encore plus. Je crois que c’est de même avec la lutte, je crois que nous en sommes au point où nous pouvons en parler et montrer aux dénigreurs que la lutte, ce n’est pas du “n’importe quoi, lancé n’importe comment, devant des fans crédules”.

Maintenant, j’entre dans le vif du sujet. Un lutteur doit savoir lire l’ordre des matchs et travailler avec ceci et avant tout, un bon scripteur doit aussi avoir une idée du rythme d’un gala et bâtir sa carte en conséquence.

Le premier match important de la soirée est justement le premier match. C’est lui qui met la table pour la soirée et confirme aux fans qu’ils ont fait le bon choix de s’être déplacés et d’avoir payé pour leur billet d’entrée. La foule est déjà chaude au début du gala, ils ont payé pour y être et ont hâte que ça débute. Alors les lutteurs doivent en être conscients. Le premier match peut se permettre de débuter plus lentement et d’y aller avec de la lutte plus technique ou des actions visant à jouer avec les spectateurs et les faire interagir avec eux. Les fans sont déjà conquis et c’est le temps de mettre la base de la lutte en valeur; Deux athlètes qui tentent de gagner une compétition sportive. C’est ce qui doit être démontré. Ensuite le combat évolue  selon les personnages et le scénario voulu. Important aussi de bien finir le premier match avec un “happy ending” pour solidifier l’énergie de la foule et garder le momentum de l’ouverture du gala. Un “finish” simple, clair, net et convaincant est l’idéal. Rien de pire pour saboter une ouverture de gala qu’une fin de match floue et non conclusive, d’en finir avec une disqualification par exemple.

Le second combat a aussi sa grande importance, il doit être totalement à l’opposé du premier combat. Le but est de jouer avec les émotions des fans et de leur montrer que ce soir, tout est possible. Si le premier combat a bien été fait, les combattants du 2e peuvent surfer sur cette vague et en profiter pour choquer les fans avec un début rude et plus rapide. L’art est dans la gestion des contrastes et c’est le job du 2e combat. Si en plus ce combat finit avec un vilain qui se fait huer à tue-tête, tu es lancé pour une soirée dynamique et qui ne décevra pas les fans présents. Mais pour ça, les lutteurs du 2e combat doivent être attentifs à ce qui se fera avant eux pour s’assurer de justement, créer le contraste voulu. Un travail d’équipe je te disais. Ce travail débute avant même que le gala débute.

Ensuite, le match avant la pause, la mini finale que j’appelle. Les lutteurs doivent la travailler comme s’ils étaient dans la grande finale, mais plus condensée en temps. Mais ils se doivent de faire vivre des émotions en montagnes russes aux fans et les épater comme dans une finale. Ici, la fin peut être diversifiée, on peut finir ça nettement ou en queue de poisson servant la rivalité et les galas à venir. L’important, trouver une façon de laisser le fan sur son appétit un petit peu pour qu’il en redemande lors de la 2e partie du gala. Ici, on peut être vraiment créatif, c’est un combat amusant pour un lutteur car on peut se permettre plein de choses sans avoir la pression du gala tout entier sur nos épaules. Belle place, pour un promoteur, d’essayer un lutteur que l’on prévoit dans une grande finale à court et moyen terme.

Maintenant, nous en sommes au combat le plus difficile à travailler sur le gala, le premier combat après la pause. Il faut travailler fort à ce moment. Les fans se sont reposés, l’adrénaline a baissé, l’excitation d’ouverture du gala qui sert le premier combat n’y est pas. Ici, les lutteurs partent de zéro et ils doivent en être conscients. Pour aider, le promoteur pourrait envoyer un lutteur faire une promo au micro, un vilain avec de la gueule pour souffler sur les braises et rallumer le feu ou un bon animateur de foule le temps que tous les fans puissent reprendre leur place. Mais quand même, ce match doit faire “BOOM” et le plus vite possible s’il vous plaît. Ça doit brasser, frapper et bouger vite en partant pour que les spectateurs retrouvent leur niveau d’adrénaline. Le travail ici est d’aider ceux qui viendront après toi et repartir le tout pour avoir une foule endiablée lors de la grande finale.

On parle souvent, avec raison, de l’importance de la finale. C’est souvent le combat qui a servi de facteur déterminant aux fans à savoir s’ils viendraient ou non. Mais trop souvent on oublie que le combat juste avant est celui qui met la table. Je fais attention pour ne pas le faire, mais là, je vais parler de moi, de comment je le fais. Quand je suis juste avant la finale, je me renseigne sur ce qui va se passer en finale, les points majeurs, quelles séquences ils feront et comment ils comptent finir la soirée. Pourquoi? pour être certain de ne pas faire ce qu’ils feront mais aussi, m’assurer de faire le contraire, d’envoyer de faux messages, ou fausses pistes aux fans pour qu’ils réagissent encore plus lors de la finale. Bon, ce n’est pas clair, voici un exemple concret :
Si je sais qu’en finale, un moment important du combat sera :  le vilain assommera le héros avec une chaise, pour que les fans croient que leur favori sera perdant, mais que dans un moment de grâce, celui-ci soulèvera une de ses épaules une micro-seconde avant que la main de l’arbitre frappe le sol une 3e fois, créant un délire de joie dans la foule. Bien, si c’est possible, je vais essayer que mon match finisse avec le vilain qui gagne en frappant le héros avec un poing américain ou une fourberie semblable. En imprimant cette image dans la tête des fans, je viens de donner un sérieux coup de main à mes collègues de la finale pour avoir la réaction voulue. Un travail d’équipe encore une fois.

Puis là, le plus important, la grande finale. Là, l’analyse est simple, les meilleurs éléments y sont et s’ils y sont, c’est en grande partie car ils savent ce qu’ils font. On laisse les lutteurs libres d’épater la galerie et de donner tout ce qu’ils peuvent. Pour les lutteurs, c’est le temps de briller et de montrer tout ce qu’ils peuvent faire. Le succès du prochain gala dans le même édifice dépend souvent de ce combat. Mais si tous les gens impliqués sur le gala ont fait leur travail, ceux qui font les frais de la grande finale auront une base solide sur laquelle travailler.

Je sais qu’il peut y avoir des lutteurs plus égoïstes qui se foutent totalement du reste du gala, qu’ils croient que ça ne les regarde pas. Mais faut toujours penser aux spectateurs et penser à leur vision, depuis les gradins. Eux, ils ne te voient pas en exclusivité, ils voient un gala complet et c’est cet ensemble qui sera jugé en premier lieu lors de leur retour à la maison. Ton combat aura toujours l’air meilleur dans un bon gala et aussi bon soit-il, ton combat aura l’air plus ordinaire lors d’un mauvais gala. Le lutteur lui-même est jugé sur la qualité du combat en son ensemble, pas juste par sa seule performance. Je le disais, on s’aide soi-même en aidant les autres. Tout le monde a l’air meilleur dans une bonne équipe.

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