Éthique et classe lors des galas.

Salut, j’avais dit la semaine dernière que ma chronique aurait une suite, bien cette semaine, j’en fais une suite tout en ouvrant une grande parenthèse.

Qu’est-ce que l’éthique dans un vestiaire de lutte? On le voit ce que c’est au hockey avec des émissions comme 24/CH. J’ai vécu dans des vestiaires de hockey toute ma jeunesse et c’est assez fidèle à ce que j’ai vu. Mais à la lutte, est-ce différent?

Premièrement, oui, très différent. Il y a beaucoup moins de nervosité. La nature du spectacle fait que nous ne sommes pas devant l’inconnu de la performance et du combat contre un adversaire réel. Ça change tout. Mais les relations interpersonnelles restent les mêmes, des gens qui veulent performer mis en groupe restreint. Une chose, par contre que j’ai remarquée, c’est que la pyramide hiérarchique est inversée à la lutte. Au hockey ou autre sport, ta place dans le vestiaire dépend de ta performance sur la glace. Si tu es le meilleurs de ton équipe, tu es automatiquement un leader dans la chambre, que tu sois un gars brillant, un imbécile ou une primadonna, peu importe, ça sera lui le Alpha du groupe. C’est pour ça que les équipes essaient de trouver des athlètes qui ont les 2 qualités (le talent et le leadership positif) et qu’à mon avis, une équipe est toujours mieux avec un Sidney Crosby, un Jonathan Toews, plutôt qu’un Barry Bonds ou un Terrell Owens. Mais à la lutte, souvent, la place que tu as dans le vestiaire dictera l’importance que tu auras sur le spectacle. C’est sur ce point que la lutte est vraiment plus proche d’un art (comme le cinéma, la musique, etc) qu’un sport.

Maintenant, c’est quoi l’éthique à la lutte? La première chose à faire en arrivant sur les lieux du gala, c’est d’en faire le tour et saluer tout le monde. Les autres lutteurs, le staff, le promoteur, le DJ, vraiment tout le monde. Un à un. Juste une marque de respect, on est tous dans la même équipe pour la soirée.

Ensuite, si possible, d’arriver le plus tôt possible. Question d’avoir le temps de bien tout préparer avec tout le monde. Si tu as lu ma chronique de la semaine passée, je t’ai parlé de l’importance du staff et si tu veux tout préparer avec chacun d”entre eux, ça te prendra tout le temps que tu peux avoir. Si tu arrives à la dernière minute, jamais tu ne pourras voir les “cues” de musique avec le DJ, revoir l’introduction et la sortie avec l’annonceur maison, te renseigner sur ce qui se fera dans le gala avant et après ton match (comme je disais dans cette chronique). Alors tu ne pourras pas créer cette expérience 360° pour les fans.

Lexique du jour: Expérience 360°, quand tout est mis en place par tous les intervenants du gala pour donner une expérience maximale aux fans. Du lutteur, au gérant en passant par le DJ, l’annonceur maison, le décor, la technique vidéo et sonore ainsi que la sécurité. J’y reviens plus tard. Ainsi, tu ne te contenteras pas que de faire une démonstration de prises.

En tant que professionnel, quand tu arrives, tu dois te renseigner auprès du scripteur/promoteur pour savoir tout ce que tu auras à faire durant le gala ou même après, comme filmer une entrevue pour le gala suivant ou toute autre chose. N’attends pas que le scripteur/promoteur vienne te le dire, même si c’est aussi son travail, car il a déjà une quarantaine de gens à superviser. Rends-lui la vie facile, ça améliorera toute l’atmosphère. Puis des gars qui améliorent l’atmosphère sont toujours les bienvenus partout. Ça t’ouvrira des portes pour le futur en plus de rendre ton présent meilleur. Mais assure-toi de ne pas trop en faire pour ne pas être dans les pattes, les promoteurs en ont amplement sur les bras avant un gala, tu ne peux même pas l’imaginer sans l’avoir fait toi-même.

La classe

La lutte subit de nombreux préjugés, que c’est un divertissement bas de gamme pour des assistés sociaux. Du fake, de la fraude. Pourquoi? À mon avis, la lutte paye pour le temps où ils faisaient croire aux gens que c’était de vrais combats. Dans le temps, la lutte était le sport professionnel #1 presque partout en en Amérique du Nord. Mais c’est ridicule quand on y pense, y a-t-il quelqu’un qui en veut à ses parents parce qu’ils lui ont fait croire au Père Noël?

Alors, on fait quoi à partir de là? Il faut redonner ses lettres de noblesse à la lutte. Mais comment? De un, en donnant des spectacles offrant une expérience complète aux fans. En stimulant sa vue et aussi son intellect. De là toutes mes chroniques et mon expression “Expérience 360°”, comme au cinéma. Un scénario bien joué, avec des subtilités en utilisant tous les moyens à notre disposition. Bref, présenter de l’art. Ce n’est pas parce que l’on est capable de mettre de la peinture sur une toile qu’on est un peintre. Ça va plus loin et les lutteurs doivent être des lutteurs, pas juste des gars en spandex faisant des prises… ou presque.

Puis la lutte est un des rares divertissements où la foule interagit directement avec les belligérants, où elle a un impact sur ce qui se passe ou qu’on lui montre qu’elle a un impact direct. Faut entretenir ça, mais on doit le faire avec classe. La classe digne d’un vrai sport professionnel. Le premier point, sacrer en parlant à la foule. Ça ne devrait pas exister. Un sacre devrait être utilisé seulement pour faire avancer un scénario ou pour un personnage précis. Comme dans le cas de Stone Cold Steve Austin à la WWE dans le temps. Pourquoi ça avait eu de l’impact? Car il était le seul à le faire. Sinon, ça aurait enlevé un gros morceau de son personnage si tout le monde l’aurait fait. Puis en plus, ce n’était pas de gros sacres : “Damn” (maudit) et “ass” (cul). Mais ça faisait avancer le personnage et le scénario du patron qui ne voulait pas de lui comme Champion. Justement car il ne voulait pas présenter un tel individu aux actionnaires et commanditaires. Tout partait de là, juste parce que Austin sacrait à la télé. Tout ça n’aurait pas existé si les sacres étaient permis aux autres. Le Attitude Era n’aurait probablement jamais eu l’envergure que ça a eu si on analyse l’effet papillon causé par la rivalité Austin vs McMahon.

Un exemple, quand un lutteur dit a un spectateur : “Décrisse d’icitte mon esti de gros cave de BS du tabarnak!” Ça n’encourage rien de bon et ça donne raison aux dénigreurs de la lutte. Puis ça détruit le rapprochement que l’on veut faire entre la lutte et les autres sports professionnels.

Le lutteur peut dire à la place : “Sécurité, expulsez le gars mal habillé là. Il est entré illégalement ici, je suis certain qu’il a pas les moyen de se payer un billet!”. Plus cérébral, plus classe et ça incite encore plus à une interaction, à une réponse. C,est ce qu’on veut, la réaction de la foule. Ensuite la sécurité peut jouer avec ça en se mettant du bord des spectateurs, en répondant au lutteur que non, c’est un bon client. Ça donnera du fuel au lutteur pour en mettre plus et être encore plus en colère et dérangé par la situation. Ce n’est qu’un petit exemple, mais qui fait toute une différence pour le spectateur. Puis si même un méchant peut se donner de la classe, ça augmente son aura de “star” et ça incite encore plus les gens à être prêt à débourser pour voir plus de galas.

En parlant de la sécurité lors des galas, et je terminerai avec ça, ils font aussi partie du spectacle. Comme le DJ et l’annonceur maison dont je parlais la semaine dernière. Ils jouent un rôle même s’ils ont un travail réel à accomplir. Il faudrait qu’ils le jouent de façon à montrer qu’ils sont là pour protéger le fan du méchant lutteur et non l’inverse, même si on sait que c’est la protection du staff qui est leur job. En la jouant ainsi, le membre de la sécurité tissera un lien avec les fans, ce qui réduira les chances de conflits réels avec eux. Quand un lutteur approche les fans pour interagir avec eux, les membres de la sécurité devraient retenir le lutteur, le pousser, lui dire “Touche pas aux fans sinon ça va mal aller pour toi”. Trucs du genre. Ça aide au gala car ça dit subtilement, de façon subliminale même, aux fans que les lutteurs sont dangereux pour eux. C’est ce qu’on veut, que la foule croie en la légitimité de combattant du lutteur. Pas de montrer que les lutteurs ont besoin de protection contre des fans non-entraînés. Tout ça fait partie de l’expérience 360° dont je parle dans mes chroniques.

Nous faisons de l’art, de l’art en direct, en 3D avec interaction du public. Aucun autre divertissement n’offre ça. Faut justement le développer à fond pour le rendre légitime et respecté. Car avec la légitimité et le respect, viennent les spectateurs payants qui ne s’intéressent pas encore à la lutte.

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