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25/02/2015 | Chroniques

La lutte en Corée du Nord, deuxième partie

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La semaine dernière, je traitais de l’organisation du Festival International du Sport et de la Culture pour la paix, soit un gala de lutte organisé par Antonio Inoki, via la New Japan Pro Wrestling (NJPW), en collaboration avec les autorités nord-coréennes. Ce gala fut également nommé Collision in Korea, étant donné la participation d’Eric Bischoff et de la WCW. Le combat principal mettait aux prises Inoki face au légendaire “Nature Boy” Ric Flair.

Cette semaine, il sera question de l’évènement en tant que tel.

INÉGALITÉS

Les Nord-Coréens sont coupés du monde. Encore aujourd’hui, la majorité n’a pas accès à Internet ni à toute autre information venant de l’étranger.

On leur enseigne depuis toujours qu’ils vivent dans un monde privilégié, celui du communisme., où les richesses sont réparties également… Officiellement. (L’élite gouvernante et l’armée ont d’abord tout. Il y a ensuite la population normale, et il y a ceux des petites villes, qui vivent dans la pauvreté. Sans compter les milliers de prisonniers politiques.)

Mais est-ce que le contact aux étrangers peut ébranler cette perception ?

Certainement ! Et pour le démontrer, Ric Flair y va d’une anecdote :

« La personne qui me surveillait là-bas me demande comment ma montre coûtait. Quand je lui ai donné le prix, il a rétorqué “Comment quelqu’un peut avoir autant d’argent ? C’est plus que ce que je fais en cinq ans. ” Je lui ai demandé son salaire. C’était l’équivalent de sept dollars américains par semaine. L’avoir su plus tôt je n’aurais jamais porté cette montre devant lui. »

L’ÉVÈNEMENT

170 000 spectateurs pour un gala de lutte ? Vraiment ?

Pourtant, ce fut toujours reconnu que WrestleMania III en avait beaucoup. 78 000 !

Mais comment ont-ils fait pour entasser 100 000 PERSONNES DE PLUS ?

… C’est certain que d’avoir le plus gros stade au monde, ça aide.

De quoi faire paraître notre Stade Olympique comme un cabanon. Le Stade du Premier-Mai (oui, c’est le vrai nom) a une capacité de 150 000 places assises. (Toujours plus facile de construire un énorme stade alors que tu ne nourris pas ton peuple qui vit de perpétuelles famines, en passant)

Habituellement utile à la présentation d’énormes démonstrations rendant hommage au régime, à la tenue de matches de soccer des équipes nationales ou théâtre d’exécutions publiques (POUR VRAI), le Stade du Premier-Mai était le théâtre d’une des toutes premières démonstrations d’ouvertures du régime communiste vers l’occident.

Il y avait deux jours de combats. La plupart de ceux-ci étaient bien traditionnels ; un gentil Asiatique vs un pas fin Américain. Dans les pas fins américains avec notre Nature Boy préféré, on pouvait compter entre autres Road Warrior Hawk, Chris Benoit et les frères Steiner.

(Personnellement, imaginer Scott Steiner constamment entouré de guides nord-coréens qui font trois têtes de moins que lui, ça m’amuse beaucoup.)

Si vous regardez des extraits du gala, vous remarquerez que la foule semble presque inactive. Bien sûr, c’est connu que les foules asiatiques réagissent calmement à un match de lutte, parce qu’ils le regardent plutôt attentivement. Mais qu’en était-il sur place ?

On peut penser que le public était invité à l’évènement au lieu d’être acheteur de billets, comme c’est le cas dans plusieurs évènements d’État à Pyongyang, où l’Élite est invitée à divers évènements. En sachant que leur culture de la lutte est pas mal au niveau zéro, ça explique pourquoi ce n’était pas une foule style Zone Molson Ex.

Par ailleurs, cet évènement était un des tout premiers où les autorités locales invitaient les touristes internationaux. 15 000 touristes japonais, chinois et américains étaient de la partie ; nombreux de ce groupe étaient des immigrants coréens qui se sont rendus sur place seulement dans l’espoir revoir des proches perdus lors de la guerre de Corée 40 ans plus tard. Comme c’est toujours le cas actuellement, toute rencontre entre les touristes et les locaux était prohibée. Inutile de dire que plusieurs touristes ont des souvenirs plutôt douloureux de ce voyage à Pyongyang.

En passant, inutile de vous dire que Ric Flair a perdu son match contre Antonio Inoki. Et ce en 14 minutes seulement… On est loin d’un classique.

ALI EN CORÉE DU NORD

Oui, j’ai mentionné plus tôt que le plus grand boxeur de tous les temps était de passage en Corée du Nord aussi, et ce à titre d’invité d’honneur ; il n’est pas apparu sur le ring dans quelconque fonction comme à la toute première édition de WrestleMania.

Est-ce qu’il a aimé son séjour ?

Peu de choses sont dites par rapport à ça, sauf un extrait révélateur de l’autobiographie de Ric Flair :

« À cause de la maladie de Parkinson, c’était difficile de bien comprendre Muhammed Ali lorsqu’il parlait. Mais à un moment, lorsque nous étions ici à une grande table avec un groupe de dignitaires nord-coréens, il y en avait un qui commençait à déclarer que la Corée du Nord était supérieure, et qu’ils pouvaient éliminer les États-Unis et le Japon à tout temps. Soudainement, Ali lâche, ‘C’est pas étonnant qu’on déteste ces enfants de chienne.’

Mes cheveux se sont dressés sur ma tête. Je lui ai dit à l’oreille : ‘Merde, ne parle plus’ »

Décidément, pas un grand admirateur.

AU REVOIR

Ric Flair était immensément heureux de partir. Mais une dernière péripétie pour lui s’est déroulée à l’aéroport, lorsque les officiels Nord-Coréens lui ont demandé de faire une déclaration. Ceux-ci ont « fortement suggéré » des points à formuler, tels que la mention de la supériorité de la Corée du Nord. Flair a habilement contourné la question, pour finalement remercier le pays de leur accueil.

Sauf que c’est sorti différemment dans les publications officielles nord-corréennes.

« Avant de quitter ce magnifique et pacifique pays, je voudrais rendre hommage au Grand Leader Kim il-sung, qui a dédié sa vie pour rendre le peuple coréen heureux et prospère, ainsi qu’à l’unification de la Corée. Son Excellence, Kim il-sung, sera toujours avec nous. »

Belle citation approximative.

Revenu au Japon, Ric Flair s’est alors mis à genou et il a embrassé le sol.

Je crois qu’on peut dire qu’il était heureux de revenir en terre démocratique.

ET MAINTENANT  ?

Antonio Inoki a organisé un deuxième évènement du genre en août dernier, mais ce dans une salle beaucoup plus petite, et ce avec des combats de taewkwando. Les lutteurs faisant partie de cette délégation sont relativement inconnus du public nord-américain.

On a beaucoup plus parlé des visites de Dennis Rodman en février 2013 et janvier 2014, où on a parlé de “diplomatie par le basketball”. (Le président de la Corée du Nord actuel, Kim jong-un, est connu pour être un énorme admirateur de basketball)

On peut conclure qu’Antonio Inoki et Dennis Rodman ont un point en commun. Malgré le comportement erratique de Rodman, les deux croient que des pays en conflit l’un contre l’autre peuvent arriver à établir un semblant de début de relation cordiale par le sport. Si on aime le sport de l’autre, pourquoi le détester ?

Est-ce que cette approche est légitime ? On verra…

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