Filmomania XIV – Jim Duggan, Kurt Angle, Matt Hardy, Shane Douglas, Roddy Piper et autres dans “Pro Wrestlers vs Zombies”

C’était pourtant une si bonne idée, sur papier.

Pro Wrestlers vs Zombies (2013) fait partie de cette vague ironique des dernières années qui fait que tout ce qui contient des requins, des moustaches, de la bière cheap, des nazis, du bacon ou des zombies devient automatiquement « in ». Cependant, les produits qui en résultent n’ont aucune valeur et ne sont vaguement drôles que s’ils sont mentionnés dans des conversations de bar en buvant de la 50. Donc, si je vous dis que des moustachus habillés en québécois des années 80 se battent contre des nazis en selle sur des requins zombies en buvant de la Laurentides, on va en rire une bonne shot. Même chose si je vous dis que ça serait drôle de voir un vieux Hacksaw Jim Duggan buter un zombie avec son 2×4 en bobettes bleues. On va rire… sans plus. Mais Cody Knotts, lui, a fait comme ceux qui ont fait Sharknado ou qui se font des burgers de poutine en remplaçant le pain par du bacon: il a réalisé le film. Ça, c’est Pro Wrestlers vs Zombies. L’histoire? Shane Douglas tue un lutteur dans le ring pendant un show devant 40 personnes. Pour se venger, son frère décide de se zombifier (?!?) et de faire engager Shane et des lutteurs pour un show dans une prison abandonnée où l’attend une horde de zombies. C’est tout… pour vrai!

Vous savez, des lutteurs qui se battent contre des forces naturelles avec leur arsenal de lutte ne vient pas d’hier. Dans les années 50 en Amérique Latine, et pendant près de 30 ans, El Santo, luchador au masque d’argent, sûrement le lutteur mexicain le plus iconique de tous les temps, jouait dans des films de genre, où il combattait des zombies, des vampires, des momies, des scientifiques diaboliques ou voyageait tout simplement dans le temps. Plusieurs lutteurs ont emboîté le pas et la tradition se poursuit encore de nos jours. Rien d’étonnant qu’on ait aussi droit à notre version États-unienne. Comment se fait-il alors que je sois si peu réceptif à voir Roddy Piper ou Matt Hardy tuer des zombies? Je fais juste l’écrire et me semble que ça se regarderait tout seul?! Je vais tenter de vulgariser ma frustration devant le fait que non.

Deux problèmes : Cody Knotts et Shane Douglas. Cody écrit et réalise alors que Shane produit et joue le rôle principal. Je n’ai rien contre ces hommes dans la vraie vie. Cependant, je n’ai jamais été un fan du Franchise. Il fait partie de ces lutteurs qui me laissent complètement indifférents et dont je n’arrive à aimer aucun match, avec Kevin Sullivan, les Usos et Lex Luger. Cody Knotts, lui, même s’il gravite autour du monde de la lutte et semble être un proche de Douglas, semble souffrir du principal défaut qu’un réalisateur peut avoir : Ce n’est pas un réalisateur. Le fait de tenir une caméra ne fait pas de toi un réalisateur Cody, comme tenir un pinceau ne fera jamais de moi un Van Gogh.

Pro Wrestlers vs Zombies est né d’un excès de confiance entre un lutteur qui se prend pour The Shit et un gars qui sait comment faire du montage de lutte indy. Dans leur lettre d’intentions Kickstarter avant de faire le film, Douglas prétend qu’il fera se cacher les yeux à Rob Zombie devant les scènes gore du film et qu’il amassera un meilleur box-office que 28 Days Later ou Zombieland… rien de moins. Le résultat est un peu moins vargeux, alors qu’on se retrouve avec un paquet de lutteurs à rabais, d’apparence saouls, qui font semblant de se faire mordre par des bénévoles maquillés en blanc avec du faux sang sur le bord de la bouche. C’est médiocre. Et j’aime les films amateurs, il y en a des dizaines et des dizaines chaque années à Fantasia que je me tape avec le plus intense des plaisirs. Eux sont faits par des réalisateurs. Lui, non. Le film n’a aucune logique, le scénario semble changer entre chaque scène selon qui étaient disponibles ce matin là pour se faire courir après ou jouer un zombie, les lutteurs semblent s’en crisser et le montage prouve que chaque seconde filmée est mise à l’écran, bonne ou mauvaise, question de ne déplaire au travail de personne. En plus de quelques autres ressources monétaires, ils ont amassé 30 000$ sur Kickstarter, où 500$ en don vous donnait le droit à un rôle, 750$ à un rôle où on verrait votre face, en plus de pouvoir suggérer des idées par Skype à Shane Douglas, la « wrestling legend » (auto-proclamée) en tant que PRODUCTEUR ASSOCIÉ et 1500$ vous garantissait un kill à l’écran. Difficile de faire plus amateur. Peut-être que pour un don de 15000$ j’aurais pu réaliser une scène? Ou le film au complet? Ou Matt Hardy m’aurait présenté Reby Sky?

 

 

Au final, je pense que la principale faiblesse de Pro Wrestlers vs Zombies réside dans la différence entre ce qui est promis et ce qui est livré, comme quand on voit la photo du Whopper sur le mur, et la version molasse dans notre cabaret. C’est le fait qu’on nous promette du gore à s’en cacher les yeux, mais qu’on nous offre Kurt Angle zombie… qui disparaît et apparaît selon les scènes, sans explication, avec sa petite ligne de sang dans la face. Le pauvre Cody aurait vendu sa business pour faire ce film et a surement brûlé tous les contacts qu’il avait. Ils ont vu grand. Ils se voyaient faire le prochain Night of the Living Dead et ramener la lutte dans les grands médias de masse. Malheureusement, la réalité leur a rappelé que 250,000$ et des rejets de la TNA (et Taya Parker) sont trop peu. Un film, c’est une machine extrêmement compliquée, un réseau incroyablement complexe d’éléments qui doivent tous converger dans un but commun et une pièce maîtresse qui doit tout tenir ça ensemble. The Franchise, avec ses amis Facebook et son Kickstarter, n’est pas un producteur, et Cody Knotts n’est pas un réalisateur. Je suis persuadé qu’ils ont mis un nombre incroyablement élevé d’heures sur le projet et que tout a été fait avec les meilleures intentions napoléonesques. L’effort était là, mais la version que vous imaginez en disant « Heille Kurt Angle pourrait tuer un zombie avec un Angle Slam » est supérieure à ce que vous verrez à l’écran. Promis.

 

La mort merdique du méchant de la fin, aux mains de Roddy Piper. Il semble être le seul qui n’est pas au courant qu’il reçoit des coups de crowbar…

Shane, si tu lis ceci et que t’es en tabarnak après moi, j’ai une idée : Je vais te donner 1000$ et ta mission, c’est que je fasse un match de lutte avec toi qui me ferait avoir l’air de Ric Flair… Tu penses que je ne pourrais pas parce que je ne suis pas assez en forme et parce que je n’ai jamais pris de cours de lutte?

Pourtant, tu as fait un film de zombies seulement parce que tu es un fan de films de zombies…

ben moi, je suis seulement un fan de lutte…

La semaine prochaine, on s’en va à Longueuil, avec Lorenzo Lamas, voir un de mes films préférés, avec un nouveau lutteur!

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