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09/09/2020 | Chroniques

Vince McMahon a-t-il (complètement) perdu la tête?

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Vince-McMahon

Depuis l’annonce, il y a quelques jours, des nouvelles restrictions auxquelles seront soumis les lutteurs et lutteuses de la WWE à compter du 2 octobre prochain, il est à se demander si Vince McMahon et les membres de sa garde rapprochée ont complètement perdu la tête. Il n’est pas rare que nous ayons critiqué certaines décisions du Chairman of the Board (président du conseil d’administration) de la WWE au fil des ans, mais à cette occasion précise, il y a véritablement matière à s’inquiéter des abus de pouvoir de plus en plus asservissants de McMahon.

Avant d’aller plus loin, résumons d’abord les faits. La WWE annonçait le 3 septembre qu’à compter du 2 octobre prochain, les «talents» (lutteurs, lutteuses et personnalités télévisuelles) étant sous contrat avec la compagnie n’auront plus le droit d’utiliser, d’une quelconque manière que ce soit, des tierces plateformes en ligne (telles que Twitch, Cameo, YouTube, TikTok et autres) qui ne sont pas contrôlées par la WWE. McMahon y est allé de la déclaration écrite suivante:

«Certains d’entre vous êtes impliqués dans des tierces parties en utilisant votre nom et votre image d’une manière qui est nuisible à notre compagnie. Il est impératif que ces activités cessent d’ici les 30 prochains jours. À compter du 2 octobre prochain, toute violation de cette politique sera passible d’amende(s), de suspension(s) ou de congédiement, à la discrétion de la WWE.»

Je vous l’accorde, jusqu’ici, cette nouvelle à elle seule ne constitue pas le scandale du siècle. Vous vous dites sans doute que les nombreux lutteurs ayant leur propre chaîne Twitch n’ont qu’à modifier leur nom d’utilisateur, quitte à se servir de leur véritable nom. C’est d’ailleurs ce qu’a fait l’ex-lutteuse Paige, lundi dernier. Mais le problème est beaucoup plus insidieux qu’il ne paraît au premier abord.

Si certains lutteurs pensaient pouvoir poursuivre leurs activités sur ces tierces plateformes en se contentant de cesser d’utiliser leur nom de lutteur, le Senior Director of Talent Relations (directeur principal des relations avec les lutteurs) de la WWE, Mark Carrano, leur a jeté une sacrée douche d’eau froide. Carrano a soulevé un tollé d’indignation en déclarant que la WWE était également propriétaire des droits relatifs aux noms de naissance des lutteurs, ainsi que de leur image. Oui oui, vous avez bien lu! Selon Carrano, si vous êtes sous contrat avec la WWE, vous ne pouvez même pas utiliser votre propre nom de naissance sans l’autorisation de la compagnie! Aussi bien dire que vous avez vendu votre âme au diable!

Hier, le 8 septembre, le site de nouvelles Ringside News rapportait que la WWE s’était partiellement rétractée. Visiblement soucieuse d’apaiser la colère de ses employés, la WWE a clarifié que les lutteurs pourraient utiliser leur nom de naissance sur les plateformes concernées, à condition d’avoir l’autorisation préalable de la compagnie, et sous certaines restrictions. Mais quelles seront ces restrictions au juste, et seront-elles appliquées équitablement, ou favoriseront-elles les principales vaches à lait financières de l’entreprise? Ça reste à voir.

Pour compléter le tableau, permettez-moi d’ajouter ceci. En tant qu’entrepreneurs indépendants (independent contractors), les lutteurs et lutteuses de la WWE sont essentiellement des travailleurs autonomes, n’ayant droit à aucune assurance médicale, aucun avantage social, aucun régime de retraite… Bref, ils sont laissés à eux-mêmes, contrairement à tous les autres athlètes professionnels nord-américains (hockey, baseball, football, basketball, soccer, etc). Sans compter que le salaire moyen d’un lutteur de la WWE (exception faite des 3 ou 4 lutteurs les mieux payés) correspond à une fraction du salaire des athlètes professionnels oeuvrant dans les autres sports majeurs. En période de pandémie, les revenus des lutteurs et lutteuses de la WWE ont diminué radicalement puisqu’aucun live event (spectacle non télévisé) ne peut être présenté, et qu’aucun produit dérivé (t-shirts et autres) ne peut être vendu dans les arénas où ont habituellement lieu les galas ainsi que les enregistrements télévisuels. Or, plusieurs lutteurs comptaient, depuis le début de la pandémie de COVID-19, sur des revenus supplémentaires grâce aux plateformes Twitch et Cameo, par l’entremise desquelles ils pouvaient envoyer des messages vidéo personnalisés à leurs fans, moyennant une somme d’argent X (par exemple: des souhaits d’anniversaire, des félicitations pour une graduation, etc). Ceci leur est dorénavant interdit, ou est du moins soumis à un contrôle en apparence aussi sévère qu’arbitraire.

À mon humble avis, cette nouvelle politique est due à deux faits aussi répugnants l’un que l’autre. D’une part, il s’agit d’une façon de contrôler encore davantage ce que disent les lutteurs de la WWE dans leurs temps libres. Vous savez peut-être qu’AJ Styles a admis récemment sur sa chaîne Twitch qu’il avait contracté la COVID-19, une révélation que la WWE souhaitait étouffer pour ne pas nuire à son image corporative, alors qu’elle a fait preuve d’un laxisme odieux dans sa manière de gérer la crise sanitaire à son Centre de performance, en Floride. D’autre part, la WWE se prépare fort probablement à joindre ces autres «tierces plateformes» et à couper l’herbe sous le pied des lutteurs en encaissant en amont la majeure partie de l’argent qui allait dans leurs poches. Ne vous surprenez pas si, d’ici quelques mois, vous apprenez que la WWE est désormais sur Twitch ou Cameo, et que moyennant une somme d’argent ridiculement élevée, vous pouvez recevoir un message vidéo personnalisé de votre lutteur favori. Quel maigre pourcentage du montant que vous débourserez sera réellement empoché par le lutteur ou la lutteuse que vous aimez? Tout dépendra du niveau de gourmandise sans cesse grandissant de l’empire McMahon et de ses actionnaires.

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Une CHRONIQUE D’OPINION signée Etienne Godin

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